Monika Glet

PLU Cervières : de la bonne volonté mais des efforts insuffisants concernant la protection du massif du Chenaillet

Poursuivant inlassablement son travail de veille et d’alerte, Mountain Wilderness (MW) a tenu à participer à l’enquête publique ouverte au sujet du nouveau PLU (Plan Local d’Urbanisme) de la commune de Cervières, dans les Hautes-Alpes. En effet, c’est sur le territoire de cette commune que se situe le massif du Chenaillet, dont la protection et la sauvegarde font partie des combats de longue date de notre association.

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Hautes-Alpes
Queyras
Aménagement

Écrit par le comité de rédaction

Publié le 17 févr. 2021
Reconnue pour l’ensemble de son action en faveur des territoires de montagne, MW s’est récemment adressé dans un courrier à Madame la Préfète des Hautes-Alpes avec le collectif associatif du Briançonnais1 pour rappeler que ce collectif était toujours actif et prêt à reprendre le travail concernant la création d’une réserve naturelle sur cette zone (initiative malheureusement abandonnée après la réforme du statut des réserves naturelles intervenue en 2002).


Un PLU en contradiction avec le SCoT briançonnais

Nous saluons la volonté affichée et les efforts effectués par la commune de Cervières pour la gestion de cet espace remarquable. Néanmoins, comme le souligne le PLU, ce massif est soumis à une pression touristique forte en raison de sa fréquentation.
Si le souci du PLU en matière d’entretien des sentiers et itinéraires, de sensibilisation du public et de restructuration des pistes de fond est tout à fait louable (à cet égard, on peut regretter simplement que le PLU n’identifie pas précisément les itinéraires utilisés pour la randonnée et d’une manière plus générale pour la découverte des sites naturels de la commune), nous pensons également que le Massif du Chenaillet nécessite la mise en place d’outils de protection renforcés.

C’est d’ailleurs en ce sens que nous étions intervenu lors de l’instruction du SCoT du Briançonnais, en particulier lors de son passage devant la Commission UTN du Massif des Alpes où Mountain Wilderness représente les associations de protection de l’environnement : au nom des associations membres du collectif associatif du Briançonnais (listées en note de bas de page), nous avions « réitéré avec fermeté notre demande de propositions concrètes, car et scientifiquement justifiées, de préservation, de gestion et de valorisation du patrimoine naturel (faune, flore, écosystèmes, géologie...) du Briançonnais et en particulier de l’ensemble exceptionnel du massif du Chenaillet, des sources de la Durance et du Marais du Bourget. »

Nous nous appuyions notamment sur les engagements de longue date de l’État en ce sens ; ainsi, le courrier du 29 octobre 1996 de la Ministre de l’Environnement de l’époque à l’association Arnica Montana, reconnaissait la nécessité de créer une réserve naturelle volontaire, et, si cela ne pouvait être fait, prévoyait la mise en place d’une protection forte de type réserve naturelle ou classement de site, en raison de l’importance des enjeux paysagers certes, mais aussi biologiques de tout ce secteur. L’intérêt de ce site ne s’est pas démenti depuis lors.

Or nous relevons l’absence de disposition du PLU allant dans le sens d’une protection forte. Seule sa situation dans un espace naturel sensible est mentionnée et ne se traduit pas par un zonage spécifique. Cette lacune est d’autant plus significative qu’elle est en contradiction avec les dispositions du SCoT du Briançonnais qui indique : « […] le PLU en cours d’élaboration de la commune de Cervières précisera les mesures environnementales adaptées à la préservation de cet espace naturel2. »

Un site emblématique pour Mountain Wilderness et son action

Pour mémoire, l’intérêt de notre association pour ce site s’est également manifesté par l’organisation de plusieurs opérations de démantèlement d’installations obsolètes d’origine militaire sur différents secteurs du massif, dont deux en 2020 (près de 20 tonnes au total retirées de la montagne).

D’autres sont encore prévues. Les enjeux majeurs de ces opérations étaient de favoriser les bonnes conditions d’exploitation des alpages et d’améliorer l’aspect naturel et paysager de certains lieux encombrés de fils barbelés et autres ferrailles délaissées depuis aussi loin pour certains que la dernière guerre mondiale. Ces déchets sont dangereux pour le bétail, la faune sauvage et disgracieux pour le tourisme de découverte sur un site très fréquenté par les randonneurs, voire même par des sorties scolaires.

Encore un effort à faire pour la préservation des espaces agricoles

Nous croyons aussi que, dans le même esprit, la préservation des espaces agricoles mériterait des dispositions particulières. Là encore, le PLU n’est pas en cohérence avec le SCoT qui identifie les espaces agricoles de Cervières (pages 71 et 72) comme des espaces agricoles « remarquables » devant faire l’objet de « Périmètres de protection des Espaces agricoles et Naturels » ou d’un classement en « zone agricole protégée ».

Or ces dispositions ne sont pas mise en œuvre dans le projet de PLU. Cette absence est d’autant plus dommageable que la protection de ces espaces participerait grandement à la sauvegarde et à la mise en valeur du patrimoine paysager si remarquable de Cervières. L’AVAP aurait pu également y contribuer en prenant en compte la préservation des nombreux chalets d’alpage et de leurs abords. Ce patrimoine bâtit, témoigne de la présence de l’homme de longue date dans la haute vallée ; il témoigne également de l’économie de moyen, de la rationalisation de l’usage des espaces, et de la capacité d’adaptation dans ces lieux « hostiles » dont il a fait preuve. Il est donc important de préserver ces bâtiments, mais aussi de conserver lisible la manière dont ils ont été implantés, en ne permettant pas l’ajout de bâtiments neufs ou d’appendices ou annexes divers à ces chalets.

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