© Nicolas Grunbaum

En montagne comme ailleurs, replacer l’intérêt général au cœur des décisions

En montagne et ailleurs, replacer les équilibres environnementaux et l’intérêt général au cœur des décisions, s’appuyer sur des débats publics à la hauteur des enjeux écologiques : seule issue pour apaiser les tensions et croire en l’avenir des territoires !

Aménagement
Tourisme
Montagne à vivre

Écrit par le comité de rédaction

Publié le 28 avr. 2023

Center parcs, méga-bassines, retenues collinaires, projets immobiliers ou industriels, extensions de domaines skiables, nouvelles infrastructures routières ou ferroviaires, autant de projets qui conduisent à l’artificialisation irréversible des territoires, qui nous interpelle et nous alerte. Dans un contexte d’effondrement de la biodiversité et d’emballement des dérèglements climatiques, la plupart de ces projets sont anachroniques, augmentent nos vulnérabilités et vont à l’encontre des transitions écologiques vitales à mener.

Une mobilisation citoyenne grandissante

Une inquiétude légitime s’exprime de plus en plus fortement dans les territoires. Depuis une dizaine d’années, de nouvelles formes de mobilisations citoyennes se multiplient, visant à pointer et dénoncer de manière pacifique les limites de projets déraisonnables (souvent soutenus par des financements publics) et appellent à de nouvelles trajectoires territoriales.

« Cette territorialisation de la contestation est décisive car elle nous libère des impuissances vécues à manifester pour des abstractions, comme le réchauffement global, et qu’elle permet de se nouer avec des choses qui sont déjà là, qui sont bien de ce monde, dont on a enfin compris qu’elles étaient précieuses : un bout de forêt, une ferme, une terre irradiant de vie, des métiers, des usages. Ce n’est plus d’abord une idée qu’on défend, c’est un petit pan de monde dont on a réappris à voir la beauté et l’importance, alors même qu’on hérite d’une culture politique hors sol. »

Ces mobilisations, dans lesquelles s’investissent beaucoup de citoyennes et de citoyens, parfois éloignés des structures traditionnelles d’engagement (associations, partis politiques, syndicats), témoignent d’un désir de démocratie locale, d’un profond besoin de replacer l’intérêt général au cœur des processus de décision et d’une urgence à concevoir collectivement l’avenir des territoires.

Rendre possible la co-construction pour sortir des postures de contestation

Faisant face à l’insuffisante considération des enjeux de biodiversité et de climat dans les politiques publiques, cet élan collectif est indispensable pour enclencher les transitions écologiques, locales et globales. Pourtant, par manque d’espaces d’écoute, de débats et de réflexions, ces énergies se retrouvent enfermées dans des postures de contestation alors qu’elles pourraient servir des démarches de co-construction.

Toutes ces mobilisations mettent en lumière les lacunes de nos dispositifs de démocratie locale et la nécessité de les transformer en profondeur. En montagne, nombre de collectifs que nous soutenons dénoncent une démocratie environnementale amputée : absence de concertation en amont des prises de décisions stratégiques, délégitimation de certaines voix, avis des citoyens non contraignants, opacité technique et administrative des procédures, manque de transparence des informations, etc.

Une négation de la voix des citoyens et du rapport au vivant

Pour ne citer que trois exemples récents dans les territoires de montagne :

  • Dans les Aravis, à la Clusaz, alors que les résultats de l’enquête publique amenaient à rejeter la cinquième retenue collinaire à 76%, la mairie a décidé d’engager le projet.
  • Dans le Vercors, le collectif Vercors Citoyens regrette l’absence de débats territoriaux sur l’avenir du territoire qui a entraîné l’annonce d’un énième projet immobilier touristique de luxe, au détriment de l’avis des habitants.
  • Dans les Écrins, le collectif La Grave Autrement dénonce le manque de transparence sur les données et études de rentabilité économique du projet de troisième tronçon, empêchant un débat réel, sérieux et éclairé.

Alors que la réponse à ces mouvements, au regard de l’urgence écologique, devrait être davantage de dialogue et de reconnaissance, les réactions gouvernementales nous apparaissent à contre-sens. La spirale lexicale inflationniste à destination des associations et mouvements écologistes, allant des « khmers verts » aux « ayatollahs de l’écologie » et désormais aux « éco-terroristes », nous inquiète et nous interpelle. Ces qualificatifs contribuent à décrédibiliser l’ensemble des voix appelant à repenser notre manière d’habiter la Terre.

Permettre aux citoyens de s’inscrire dans les processus d’élaboration de l’avenir des territoires

Face aux défis immenses qui se trouvent face à nous, l’État et les collectivités ont un rôle évident à jouer pour nous sortir de l’impasse dans laquelle les outils de concertation actuels nous mènent.

Faisons des schémas de cohérence territoriale (SCoT) et des plans locaux d’urbanisme (PLU) des démarches citoyennes dessinant des trajectoires lucides et désirables pour nos territoires. Engageons des processus de dialogue multi-acteurs sur l’ensemble des enjeux stratégiques pour nos vies (eau, agriculture, énergie, habitat, emploi, mobilité, etc.). Prenons le temps de réfléchir à la pertinence sur le temps long des projets d’aménagement de grande ampleur et aux alternatives possibles à ces derniers.
Il est temps de nous donner collectivement les moyens de transformer nos inquiétudes individuelles en ambition collective de transition !

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