Avis négatif pour la réalisation d’une retenue d’altitude dans le massif de Beauregard

Reconnue pour l’ensemble de son action en faveur des territoires de montagnes, Moutain Wilderness siège au Comité de Massif des Alpes, ainsi que dans d’autres Commissions départementales de la nature, des sites et des paysages (CDNPS), dont celle de Haute-Savoie. C’est à ce titre que notre association s’est récemment exprimée sur ce projet de retenue collinaire de 148 000 m³ au lieu-dit La Colombière dans le Massif de Beauregard inclu dans le domaine skiable de La Clusaz.

Cet aménagement a été pensé dans le cadre du ScoT Fier-Aravis, lequel est très orienté vers un tourisme exclusivement hivernal et à destination d’une clientèle internationale. L’extension de Clubs Meds et des domaines skiables y sont notamment prévus. Ce projet d’aménagement territorial a été largement critiqué au cours de son élaboration. La critique fut telle qu’une partie des UTNs (Unité Touristique Nouvelle) ont été abandonnées. Or la retenue collinaire trouvait sa justification notamment du fait des besoins en eau des logements prévus dans les UTNs mises de côté.

De plus, l’eau ainsi stockée pourrait être utilisée pour ré-ouvrir des pistes non-enneigées depuis plus d’une décennie. La doctrine de l’État et du SRADDET (Schéma Régional d’Aménagement, de Développement Durable et d’Égalité des Territoires ) ne va pourtant pas en ce sens : la neige de culture doit seulement « compléter » l’absence de neige naturelle. Par ailleurs, le domaine skiable n’est pas en reste et dispose déjà de 4 retenues collinaires de la sorte.

L’aménagement d’une telle retenue d’eau implique la construction d’une digue de 12 mètres de hauteur pour contenir les 148 000 m³ d’eau. Cette construction est projetée au cœur de paysages remarquables qui ne pourront être que fortement endommagés par les aménagements. De plus, les habitats remarquables et la biodiversité s’y trouvant seront également fortement impactés. La MRAe considère ainsi que ce « plan d’eau sommital » sera en « décalage avec la géomorphologie naturelle du territoire ».

Par ailleurs, la tourbière de Beauregard, ainsi que les autres zones humides du plateau subiront également des impacts hydrologiques du fait de ce projet. Ces zones sont inscrites dans un biotope remarquable et sont intégrées :

• dans les ZNIEFF de type 1 et 2 (Zone Naturelle d’Intérêt Écologique, Faunistique et Floristique) ;
• dans les APPB (Arrêtés Préfectoraux de Protection Biotope).

Enfin, le reste du plateau est très fréquenté. Le secteur prévu pour la retenue collinaire sert à ce jour de zone de tranquillité pour la faune et perdrait toute son utilité en cas de concrétisation du projet.

La MRAe souligne à juste titre le caractère insuffisant de l’étude d’impact hydrologique. En effet, celle-ci ne concerne que le site d’implantation de la retenue et omet d’évaluer les impacts sur les prélèvements, les captages et sur l’équilibre hydrologique du massif. Les effets du changement climatique sont également passés sous silence. Bien que 2020 fut l’année la plus chaude annuellement et que les prévisions de Météo France alertent sur ces enjeux climatiques, et en particulier dans les Alpes, ce volet n’est pas intégré dans l’étude d’impact.

Ainsi, nous considérons que ce projet :

1. n’a pas fait l’objet d’une étude hydrologique suffisante ;
2. n’est pas intégré au paysage remarquable dans lequel il prétend s’insérer ;
3. ne respecte pas les milieux naturels ;
4. ne répond aucunement aux enjeux actuels de l’indispensable transition du tourisme en montagne.

Nous émettons donc un avis défavorable. 

Avis de Mountain Widerness | Retenue collinaire massif de Beauregard