Le drapeau de l'association Mountain Wilderness flotte fièrement à Peyre Moutte, situé dans la commune de Cervières, dans les Hautes-Alpes. Ce site emblématique, en plein cœur des montagnes des Alpes du Sud, représente les actions de Mountain Wilderness pour la préservation de la nature et la lutte contre l'impact environnemental en montagne. Découvrez ce lieu magnifique et les efforts de l'association pour protéger les paysages et la biodiversité des Hautes-Alpes.
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Restauration de l'alpage à Peyre Moutte grâce aux barbelés enlevés à Cervières

Nouvelle session d’arrachage de barbelés sur le site de Peyre Moutte (Cervières, Hautes-Alpes). Un week-end Installations Obsolètes laborieux mais joyeux et enthousiaste pour les bénévoles de Mountain Wilderness. Récit.

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Hautes-Alpes
Installations Obsolètes

Écrit par Cathy Gosselin, bénévole Installations Obsolètes

Publié le 20 juil. 2020

Rassemblement des bénévoles sur le site historique de Peyre Moutte

Il est 7 heures. La bise fraîche chasse les derniers nuages d’orage de la nuit. Les bénévoles, attendus par les coordinateurs du chantier arrivent. La plupart viennent des Hautes-Alpes et des départements voisins, mais on compte aussi la présence de nos délégués de Bretagne et du Cantal. Un tiers de l’équipe est composée de locaux, naturalistes, accompagnateurs, amateurs de beaux espaces. Des jeunes, des moins jeunes et des anciens. L’équipe du chantier est complète, et certains absents seront déçus d’avoir tardé à s’inscrire.

Le briefing est bref, juste histoire de comprendre à quoi va ressembler cette journée, et de récupérer les précieux gants et outils (coupe-boulons, pioches, barres à mines et « kits de cocon »). Puis c’est la montée sur le lieux de répartition des équipes. Le site est remarquable : sur la frontière franco-italienne, il a été le lieu de combats pendant la seconde guerre mondiale. Les ouvrages de la ligne Maginot ont été implantés pour verrouiller les points de passage importants, cols et débouchés de vallées. Il est aujourd’hui occupé sur un versant par la station de ski de Montgenèvre, et sur le versant concerné par le chantier, c’est un fabuleux site géologique.

© Monika Glet

Le Chenaillet, un fabuleux site géologique

En effet, les crêtes rocheuses du Chenaillet sont formées de roches magmatiques qui représentent un fragment des fonds océaniques ligures, portés en altitude par la tectonique compressive. Les accompagnateurs en montagne du Centre Briançonnais de Géologie Alpine ont fait visiter le site a plus de 16 000 lycéens et étudiants l’an dernier. Et c’est beau, vaste, très ensoleillé. Le troupeau communal y a ses quartiers d’été. Suite au chantier de l’an dernier, la bergère avait constaté moins de blessures chez ses brebis et une légère expansion des surfaces de pâturage.

La file des bénévoles s’étend sur le sentier, drapeaux au vent, la marche d’approche permet de faire un petit échauffement à la fraîche, et est le moyen de faire connaissance et d’échanger des nouvelles. Les groupes de travail sont répartis sur différents secteurs. Sécurité et distanciation sociale obligent, ils ne dépasseront pas dix personnes. La veille, une équipe bien plus outillée est montée découper des tôles et les a déjà conditionnées. Et puis ce matin, c’est la machine à déterrer les barbelés et queues de cochon qui se met en branle. Pas d’effort démesuré, juste celui qui correspond à la force de chacune et chacun. Pour le détail : on imagine une pelote, ou un tissage de barbelés. On sectionne au précieux coupe-boulon, puis on tire en ahanant, parfois à plusieurs. Le fil s’arrache de la pelouse parfois en longue section, parfois il rompt. Et alors on prend la pioche pour déterrer le récalcitrant. Une version sylvicole existe aussi : l’entremêlement d’une pelote de barbelés dans un magnifique genévrier des Alpes (Juniperus communis). Ou aquatique quand on s’attaque à une magnifique zone humide à l’eau ferrugineuse. Puis les bénévoles convergent avec leur petit fagot de barbelés jusqu’au « cocon » ; une bâche posée sur des cordes d’escalade réformées. Une fois le volume souhaité atteint, le cocon est refermé à fins d’héliportage. Mais il ne faut pas se leurrer, ça griffe, ça déchire.

Un chantier participatif bien préparé par l'équipe de Briançon

Le chantier est organisé très longtemps en amont. Cela remonte à des mois voire des années. Rémy et son équipe du Briançonnais, Jean-Paul, les accompagnateurs du secteur, ont sillonné les pentes du Chenaillet. Ils ont Relevé sur carte les différents points concernés, évalué le volume de ferraille abandonnée et les moyens techniques et humains à solliciter. Occasionnellement les bergers et éleveurs locaux ont été interrogés. L’association patrimoniale locale a également participé au recueil d’informations et a souhaité – à des fins de témoignage – qu’une ligne de barbelés soit conservée en état. Ce sera toujours ça de moins à retirer. Et des petites mains auront aussi préparé tous les pique-niques, organisé l’hébergement, le covoiturage...

©monikaglet.com

Au total 18 tonnes de ferrailles retirées du site du Chenaillet

Le chantier dure une bonne journée. Il est possible de faire des pauses, pour boire, souffler, s’étirer, remettre de la crème solaire protectrice (nous sommes à 2 200 m d’altitude). La pause pique-nique est appréciée. Certains arrivent même à faire une micro sieste, d’autres préfèrent en finir au plus vite. Tous les goûts sont dans la nature, justement. Puis l’éclairage change, la fin d’après-midi est là. Jean-Paul, souhaitant garder des bénévoles vaillants pour le lendemain, sonne la fin des opérations. Alors la file des bénévoles prend la piste de descente. Fatigués mais contents, plus silencieux qu’au matin. Même la douche, la bière en terrasse et le repas au gîte n’arrivent pas à remonter à bloc cette masse laborieuse. Personne ne veille et en dortoir, ou sous tente, les étoiles n’auront pas d’amateurs. La bonne nouvelle est que le réveil est décalé une demi-heure plus tard.

Dimanche matin : on recommence. Ce serait presque monotone si l’on ne changeait pas de secteur, ou d’équipe ou de qualité de barbelés. Le quota de ferraille recueillie sera atteint en début d’après-midi, ce qui permet à chacune et à chacun de reprendre la route. Sauf la dizaine d’irréductibles répartis à chaque poste pour aider à l’hélitreuillage des cocons.

C’est le début de l’été au Chenaillet. Place est laissée aux troupeaux, aux randonneurs, vététistes. Cela n’a pas vraiment l’air d’avoir changé. Nous en sommes juste à 18 tonnes de ferraille en moins après 2 chantiers dans cette zone. Merci à tous et à la prochaine !

  • Le groupement pastoral
  • L’association « Les Aittes »
  • Un remerciement à Renaut Mosdale pour son don

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